Cynorrhodon givré

L’églantier et ses cynorrhodons

Cette semaine, j’ai envie de vous parler de l’églantier. Rosa canina, le rosier sauvage. En ce moment, juste avant Noël, il nous offre ses fruits ovales de couleur rouge vif, les cynorrhodons. Ils égaient le paysage, qui est parfois bien gris et triste à cette saison. Ils peuvent apporter une touche « nature » dans la déco de Noël, ils nous donnent un coup de fouet à la Vitamine C pour bien passer les fêtes et permettent de réaliser de délicieux cadeaux « faits maison ».

Eglantier, cynorrhodons

Habitant de la haie

L’églantier s’installe dans les terrains en friche, en lisière de forêt et on le retrouve couramment dans les haies avec le prunellier, l’aubépine et la ronce, bien en famille entre Rosacées qui piquent. Toutes ces espèces se retrouvent spontanément ensemble, comme c’est le cas chez moi dans le Loiret. J’ai pu également l’observer encore dernièrement sur des dunes de la baie de Somme en pleine végétalisation naturelle.

Jadis, ces espèces arbustives étaient plantées ensemble autour des jardins et des prés pour établir de véritables barrières végétales infranchissables par la densité de leur végétation et par leurs épines. (Voir l’article sur l’aubépine l’article sur l’aubépine et sur le prunellier.)

L’églantier est un arbrisseau (je vous explique la différence entre un arbre, arbuste et arbrisseau dans mon article sur le prunellier) qui atteint environ trois mètres de haut. Ses tiges minces et souples sont souvent courbées et portent des épines crochues (plus précisément, si on reste dans la terminologie botanique, ce sont des aiguillons). Avec l’âge, les tiges se rigidifient et peuvent prendre l’aspect de véritables troncs de couleur grise.

Eglantier en fleurs

Des feuilles stipulées

Les feuilles sont alternes (une feuille à gauche, un peu plus haut une feuille à droite etc) et pennées (constituées de folioles disposées de part et d’autre d’un axe médian). Elles ont 5 à 7 folioles, en général sans poils (= glabres) mais parfois pubescentes dessous. Les folioles sont ovales et dentées. Le rachis de la feuille est épineux et à la base de celui-ci poussent de petites stipules. Ce sont des pièces foliaires, au nombre de deux, en forme de feuilles réduites situées de part et d’autre du pétiole, à sa base, au point d’insertion sur la tige. Les stipules sont caractéristiques de la famille des Rosacées.

Feuilles d'églantier givrées

Des fleurs de toute beauté

L’églantier déploie sa beauté de fleurs en mai et juin. Les fleurs de 45 à 50 mm de diamètre ont 5 pétales roses ou blancs et de nombreux styles et étamines. En dessous des jolies pétales parfumés, se trouvent 5 sépales verts profondément découpés et pointus. Quand on regarde ces sépales de près, on s’aperçoit que deux des sépales sont « barbus », un sépale est barbu d’un côté et « chauve » de l’autre et les deux derniers sépales sont chauves. Cette « formule » s’applique curieusement à chaque fleur.

Fleurs de Rosa canina
Fleurs de l’églantier – rosa canina

Faux-fruit : le cynorrhodon

Le fruit de l’églantier, le cynorrhodon, est ovale, rouge vif et surmonté d’une petite capsule noire. La chair rouge renferme des « graines » couleur blanc crème entourées de poils. Ces poils qui peuvent irriter la peau font qu’on a donné le nom de « gratte-cul » à ce fruit. C’est en fait un faux-fruit, car les fruits en eux-mêmes, botaniquement parlé, sont les akènes (graines) à l’intérieur.

Rosier – symbole universel

Il existe plusieurs espèces de rosiers sauvages dont 27 en France. La Rosa canina est la plus commune en France. Distinguer les unes des autres espèces n’est pas toujours facile. Mais une confusion avec une autre espèce ne serait pas grave car les fleurs et cynorrhodons des autres rosiers sont également comestibles. Par contre, certains rosiers sont rares, comme la Rosa gallica, la rose de France ou rose de Provins, très odorante, aux fleurs rouges tirant vers le violet.

La rose est la « reine des fleurs », symbole de beauté, d’harmonie et de l’amour. Elle a été utilisée dans de nombreuses cultures depuis très longtemps. Un bouquet de roses a été découvert dans le sarcophage de Toutankhamon. Chez les romains, un esclave affranchi était recouvert de roses. Les couronnes des vainqueurs romains étaient faites de feuilles de laurier mais aussi de roses.

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Les rosiers sauvages servent encore aujourd’hui de porte-greffe pour de nombreuses variétés de roses ornementales.  Les premières roses ont été cultivées dès 2000 avant notre ère et encore aujourd’hui on continue constamment de créer de nouvelles variétés. Elles se différencient des roses sauvages surtout dans le nombre de pétales et, souvent, les couleurs.

L’églantier médicinal

Au Moyen âge, notre Rosa canina, ainsi que des variétés introduites de l’Orient, faisaient partie des jardins de curés et avaient une petite place dans les jardins potagers. On les y plantait pour leur beauté mais aussi pour les garder à portée de main pour des utilisations culinaires et médicinales.

La fleur de l’églantier serait fortifiante, hémostatique, anti-spasmodique, rafraîchissante et laxative. Son action laxative est douce et conviendrait aux enfants. Le nom de Rosa canina viendrait de la capacité de la racine à soigner après la morsure d’un chien enragé.

Les fleurs doivent être cueillies juste avant leur épanouissement, quand elles sont encore en bouton. C’est là qu’elles dégagent le plus de parfum. Pour ne pas noircir et perdre leur parfum, elles doivent être séchées à l’abri de la lumière. Elles peuvent bien-sûr être utilisées fraîches, mais cela limite leur emploi aux mois de mai et juin.

Utilisations des fleurs de l’églantier

Hildegarde de Bingen, la célèbre religieuse bénédictine allemande du 12ième siècle, conseillait de poser des pétales de roses cueillies à l’aube sur les yeux pour les calmer et stopper des écoulements.

Pour pouvoir se servir des bienfaits des pétales de rose toute l’année, on en confectionnait des sirops, on captivait leur parfum et leurs propriétés dans du sucre, on en préparait des onguents. Aujourd’hui, c’est l’utilisation de l’eau de rose qui prévaut. C’est un produit de la fabrication de l’huile essentielle de rose. Lors de la distillation, la vapeur d’eau qui traverse les pétales se charge d’huile essentielle. Cette dernière, plus légère que l’eau va se mettre à flotter au dessus de l’eau. On peut alors « récolter » d’un côté l’huile essentielle et de l’autre côté l’hydrolat ou « eau de rose », appréciée pour son action rafraîchissante et calmante.

Hydrolat et huile essentielle de rose

Par contre, ce n’est pas notre Rosa canina qui sert à cette fabrication d’huile essentielle mais la rose de Damas cultivée et très odorante. C’est une variété de rose hybride provenant de deux espèces originaires d’Orient. Elle est principalement cultivée en Bulgarie, au Maroc et en Turquie.

Avec l’hydrolat de rose on peut calmer des yeux irrités en posant un linge imbibé d’eau de rose sur les paupières. En cas de maux de tête, un petit massage du front à l’eau de rose peut faire du bien. L’hydrolat permet aussi de calmer la peau en cas de démangeaisons.

Les fleurs de l’églantier en cuisine

En cuisine, les fleurs d’églantier peuvent servir de décoration dans les salades et les desserts. Vous pouvez en aromatiser le lait qui peut servir pour préparer un entremet. Les pétales peuvent entrer telles quelles dans la préparation de pâtisseries et de pâtes à crêpes. Si vous aimez les tartines sucrées, vous pouvez confectionner une gelée de pétales de rose ou ajouter quelques pétales pendant la cuisson de vos confitures. Ca vous inspire une confiture de fraise à la rose… ? Ou alors une confiture d’abricot à la rose… laissez parler votre créativité !

Cueillette du cynorrhodon

Mais ici je veux surtout vous parler des cynorrhodons et de leur utilisation. Ils apparaissent dès le mois de septembre. Parc contre à ce moment-là, on peut encore les laisser mûrir tranquillement. De toute façon il y a encore assez à faire pour récolter les mûres, les pommes, les poires et les prunes. C’est quand toutes ces récoltes sont finies que l’on va commencer à s’intéresser aux cynorrhodons. Pas besoin de se précipiter, les fruits sont encore là jusque dans l’hiver…

Vous avez peut-être entendu dire, à propos du cynorrhodon, qu’il faut attendre les premières gelées pour pouvoir le récolter. Pourtant, il est tout à fait comestible avant. Seulement, après les gelées, la chair rouge devient molle. Vous pouvez alors enlever le « couvercle » noir, écraser le fruit entre vos doigts et sucer la chair sucrée. Par contre, avant les gelées, au gré de mes balades, il m’arrive aussi souvent de ramasser quelques cynorrhodons encore fermes, de les couper en deux avec mes ongles, d’enlever les graines en de manger les deux demi-sphères. Leur goût est sucré et acidulé.

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Riche en vitamines

Le grand intérêt du cynorrhodon, surtout en ces temps froids, est sa teneur en vitamine C. Les fruits de l’églantier contiennent 10 à 25 fois plus de vitamine C que les agrumes.  Ils sont également riches en vitamine A, B, K, P et sels minéraux.

Pour garder le plus de vitamines, j’essaie de faire cuire les cynorrhodons un minimum. Une année j’ai réussi à récolter des fruits bien blets, la chair était bien molle. Je les ai passés tels quels dans le moulin à légumes et j’ai mélangé la pulpe avec du miel d’acacia. Un délice et une « bombe » de vitamine C !

J’ai trouvé plusieurs recettes de sauce au cynorrhodon façon « sauce tomate » avec ajout d’herbes de Provence et d’origan. Je n’ai pas encore essayé mais il parait que le goût acidulé du cynorrhodon rappelle bien la tomate. Pour la couleur, il n’y a pas photo…

Séchage du cynorrhodon

On peut également faire sécher les cynorrhodons pour les utiliser ultérieurement en tisane, pâtisserie ou compote… Pour cela on cueille les fruits fermes, on enlève le « chapeau » noir, on coupe les fruits en deux et on retire les akènes avec les petits poils qui grattent. Après, il faut faire sécher dans un endroit chaud et ventilé. J’étale les fruits « épluchés » sur une plaque et j’utilise la chaleur résiduelle du four. Après avoir fait cuire un plat, je coupe le feu et j’insère ma plaque. Une fois le four refroidi, je remue mes cynorrhodons et je pose la plaque dans un endroit ventilé, proche de la cheminée. La prochaine fois que j’utilise le four, je fais pareil… jusqu’à ce que mes cynorrhodons soient secs et que je puisse les réserver dans un bocal hermétique. Cela accélère un peu leur séchage qui peut prendre une quinzaine de jours sinon.

Ces cynorrhodons séchés peuvent trouver emploi dans de nombreuses tisanes, dans des compotes avec d’autres fruits tels que des pommes ou des poires et dans des pâtisseries. Dans son livre « Grignotages sauvages – histoire d’une boite à biscuits » de Bruno Delaunay, ce dernier présente une sorte de macaron au cynorrhodon séché qui paraît délicieux.

Stimuler le système immunitaire et chasser les vers

Au niveau médicinal, les cynorrhodons sont surtout utilisés pour renforcer le système immunitaire, grâce à leurs vitamines, les caroténoïdes et les flavonoïdes. Pourtant, dans le temps, une autre utilisation était courante : On faisait manger 5 à 6 cynorrhodons crus et entiers pendant plusieurs jours aux enfants qui avaient des vers. Les petits poils qui irritent la peau font le ménage dans les intestins.

Pour plus de détails sur les usages médicinaux des plantes, je vous invite à consulter l’article sur l’églantier d’Althea Provence.

Les « graines » et feuilles de l’églantier en cuisine

Les akènes se trouvant au centre des cynorrhodons étaient jadis moulus et ajoutés à la farine pour la rallonger. Ils étaient aussi utilisés comme substitut de café comme les graines de l’aubépine (voir l’article sur l’aubépine aubépine).

Les jeunes feuilles peuvent être hachées et mélangées à des salades ou des plats mijotés. Leur goût est doux et légèrement acidulé.

Recettes aux cynorrhodons

Cynorrhodon givré
Cynorrhodon givré

Je vous propose ces deux recettes que j’ai testé :

Merci et meilleurs vœux à vous qui avez lu cet article jusqu’à la fin, et à la semaine prochaine pour la découverte d’une nouvelle plante !

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13 thoughts on “L’églantier et ses cynorrhodons

  1. Bonjour Nathalie,
    Merci pour tous vos précieux conseils.
    Peut-on tout simplement débarrasser les cynorrhodons de leurs poils puis les congeler afin de les manger crus comme dans la nature ?
    Genre 1 fruit tous les matins en le sortant quelques minutes avant?
    Bonne journée.

    1. Bonjour Carlo, oui, c’est tout à fait possible de faire comme ça : couper les cynorhodons en deux, enlever les graines et les poils et les congeler. Comme ça vous pouvez les sortir au fur et à mesure pour votre petite dose de vitamine C tous les jours.

      1. Bonjour Nathalie. Alors j’ai fait comme j’ai dit et ça marche très bien.
        Par contre je pense qu’il faut le faire avec des fruits un peu durs, donc pas ramollis par le gel, car sinon c’est un peu galère pour enlever les graines. On enlève beaucoup de pulpe quand ils sont mous.
        Ainsi j’ai ma dose de vitamine C tous les matins.
        Au fait, à partir de quel âge peut-on en donner aux enfants?
        Merci.

        1. Pour mieux séparer les graines de la chair vous pouvez ajouter un peu d’eau pour assouplir cette dernière. Je dirais que vous pouvez commencer à en donner aux enfants au même âge où vous commencez à leur donner des oranges.

  2. Bonjour, je suis très intéressée par cette recette mais je suis étonée du fait que vous ne retiriez pas les petits poils qui sont très irritant. Cela ne pose-t-il pas de soucis ?

      1. Bonjour Nathalie, j’ai un magnifique rosier mural dans mon jardin, puis-je me servir de ses cynorrhodons pour les belles recettes que vous proposez ?
        J’ai votre superbe livre acheté lors d’une sortie ‘Plantes sauvages ‘ avec vous, mais je n’arrive pas à télécharger ‘ CUISINER LES 10 PLANTES SAUVAGES.
        Merci pour tout ce que vous transmettez et au plaisir de vous revoir.

  3. Je n’imaginais pas que l’on pouvait faire un si beau (et bon?) flan avec ces 3 ingrédients ! En plus, il me reste tellement de noix… Je serai plus attentif lors de mes prochaines balades pour récupérer des cynorrhodons, malheureusement je vais devoir attendre l’année prochaine pour la reine des prés 🙂 Je garde la recette dans mes favoris pour la faire dès que j’aurai ce qu’il faut ! Merci pour cette belle découverte 😀

  4. Madame.
    Merci pour l’envoie de vos recettes et, je crois que je vais y passer beaucoup de temps.
    Quel dommage de ne pas habiter dans votre région.
    Originaire du Nord ,c’est là que je m’inspire pour réaliser des recettes à base de plantes comestibles et médicinales.
    Je ne manquerai pas de vous laisser quelques commentaires sur votre site ou Facebook.
    Cordialement

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