Salades, sauces, soupes ou remède….
La pimprenelle faisait jadis partie des herbes qui avaient leur place – modeste mais incontestée – dans le quotidien des familles. Un peu comme le persil à notre époque, elle était présente dans beaucoup de recettes et dans tous les jardins d’aromatiques.
Aujourd’hui la petite pimprenelle est retournée vivre tranquillement sur des talus, dans des friches agricoles et les zones au sol calcaire et plutôt maigre.
Avec sa touffe de folioles délicates bien rangées le long des pétioles, ses longues tiges rougeâtres et ses boules de fleurs discrètes elle inspire une douceur tranquille, une élégance réservée mais aussi une force intérieure.
Comme dit son nom “Sanguisorba”
A l’époque où on cherchait à déduire les propriétés médicinales de l’aspect de la plante (théorie des signatures), on avait aisément fait le lien entre la couleur rougeâtre des tiges et des fleurs et le sang.
Le nom latin Sanguisorba minor vient de “sanguis” = sang et ”sorbere” = absorber. La teneur en tanins profère assurément à la pimprenelle un effet astringent. Elle est hémostatique, anti-inflammatoire et antiseptique.
Par conséquent, elle était utilisée contre la diarrhée, les pertes blanches, les saignements et pour accélérer la guérison des blessures superficielles et brûlures. Elle contient également une huile essentielle carminative qui favorise l’expulsion des gaz intestinaux tout en réduisant leur production.
Comment la reconnaître ?
Petite pimprenelle (sanguisorba minor), photo prise au printemps
La petite pimprenelle, de la famille des rosacées, est une plante vivace de 15 à 60 cm. Elle a des feuilles composées de 9 à 25 folioles ovales et dentées, la plupart du temps rangées en paires le long du pétiole avec une feuille terminale au bout, d’où le nombre de folioles toujours impair. Chaque foliole ne dépasse pas 20 mm de longueur. Jeunes, les feuilles sont vert clair. Elles deviennent de plus en plus bleutées en vieillissant (on parle alors de feuilles “glauques”).
Petite pimprenelle (Sanguisorba minor) , photo prise en automne
Les toutes jeunes feuilles déplient leurs folioles en “éventail” (voir à droite de la photo en haut de l’article). C’est celles-ci que l’on va privilégier lors de la cueillette parce qu’elles sont les plus tendres.
Dans la littérature on parle de feuilles glabres ou presque glabres (= sans poils). J’observe pour ma part, sur les individus qui poussent proches de ma maison, que les pétioles sont couverts de fins poils, les folioles étant par contre glabres (voir la photo en haut de l’article).
Des fleurs discrètes mais magnifiques
Au début du printemps, la pimprenelle reste d’abord en “touffe” que je comparerais bien à une salade car elle en a la taille (en fait il s’agit de plusieurs plantes serrées les une contre les autres). On peut, à ce stade, couper ses feuilles fraîches comme pour une salade. A partir du mois d’avril, des tiges rougeâtres terminant par une boule commencent à se dresser pour déployer les fleurs.
De loin, ces boules vertes et rouges n’attirent pas l’oeil. Mais ça vaut la peine de s’approcher pour découvrir leur beauté cachée : Les petites fleurs sont regroupées en une tête compacte. Chaque fleur est composée de 4 sépales vertes mêlées de pourpre, sans pétales. Souvent les fleurs du haut sont femelles, celles du milieu bisexuées, celles du bas mâles. Les pistils (fleurs femelles) sont surmontés d’une houppe pourpre et les étamines à anthères jaunes des fleurs mâles tombent vers le bas comme du frou-frou. Ce n’est pas magnifique, ca ?!
Photo Christophe Quintin
La floraison s’étale d’avril à août. Les fleurs se transforment alors en capsules contenant 2 ou 3 graines. Si la pimprenelle n’est pas coupée ou fauchée, les tiges avec les têtes florales persistent en hiver.
Peut-on confondre la petite pimprenelle ?
Des confusions seraient possibles avec sanguisorba officinalis, la grande pimprenelle (ou sanguisorbe officinale) qui est plus grande, a des capitules floraux plus allongés et pousse dans des lieux humides. Ses folioles sont longues de 20 à 40 mm, là où celles de la petite pimprenelle ne dépassent pas les 20 mm. La grande pimprenelle est également comestible mais a une saveur moins fine et elle est plus coriace.
Le nom “pimprenelle” peut porter à confusion avec le petit boucage dont le nom latin est “pimpinella saxifraga” mais qui fait partie de la famille des apiacées avec une inflorescence blanche en ombelle. A l’état végétatif, les feuilles ressemblent à celles de la pimprenelle. Une confusion serait sans danger car les jeunes feuilles du petit boucage se mangent également.
Une identification claire – indispensable avant toute cueillette
Cela m’amène à vous parler d’une notion très importante en cueillette sauvage : On ne cueille pas avant d’avoir déterminé avec certitude la plante en question ! Si je ne suis pas sûre à 100%, je m’abstiens.
C’est pour cela que parfois il faut une année voire plusieurs avant de bien reconnaître une plante : le temps de l’avoir observée à tous les stades de son développement.
Quand par exemple je repère des feuilles qui me semblent appartenir à telle plante, je prends mes guides de détermination, je compare : la forme des feuilles, la taille, la couleur, les informations sur les périodes de floraison, le milieu etc. Si je n’arrive pas à un résultat sûr, je ne cueille rien et je reviens quelque temps plus tard pour observer les fleurs qui souvent amènent à une identification beaucoup plus claire. Parfois il faut attendre les fruits pour être à 100% sûr…
Cette observation attentive m’amène à bien imprimer dans mon esprit l’aspect de la plante. Alors quand je retombe, un printemps plus tard, sur les simples feuilles cette image revient et cette fois-ci je peux (après, si besoin, une dernière vérification à l’aide d’un guide) dire avec certitude qu’il s’agit de telle plante.
Un jeu de patience et d’attention…
Quels usages culinaires a la pimprenelle ?
Bon, alors quand est-ce qu’on mange ?! Quand et quoi… C’est surtout les feuilles de la pimprenelle qui nous intéressent. Elles ont un goût de concombre et rappellent la saveur de la noix fraîche. L’avantage de la pimprenelle c’est que, malgré la légère amertume, son goût est accessible aux palais inhabitués, ce qui n’est pas le cas de toutes les plantes sauvages comestibles.
Et une bonne nouvelle pour la cueillette sauvage : La pimprenelle peut se manger tout au long de sa phase végétative. Au printemps elle peut servir de base de salade. L’été les feuilles sont un peu plus coriaces mais débarrassées de leur pétiole et hachées, elle peuvent très bien aromatiser une salade ou une sauce. Et à l’automne, après la dernière tonte et les premières pluies, elle redéveloppe du feuillage… Celui qui m’a servi pour vous concocter ma petite recette à suivre.
Salade, pistou, sauce diverses, comme par exemple une sauce au yaourt façon tzatziki, fromage blanc aux herbes, omelettes, soupes, légumes, ou en remplacement du persil sur divers plats… La pimprenelle s’emploie de nombreuses façons.
Les racines pourraient se manger en purée ou en légume… Pour ma part ceci reste à expérimenter.
J’ai la chance de trouver notre petite pimprenelle en abondance au bord du chemin à deux pas de la maison alors ses feuilles se retrouvent régulièrement à notre table. Je vous avais dit qu’elle contient aussi de la vitamine C ? C’est toujours ça à prendre en plus ! Surtout quand on la mange crue comme dans la recette à suivre.
Courge spaghetti farcie à la pimprenelle
Pour 2 personnes :
- une courge spaghetti de taille moyenne
- un grand bol plein de feuilles de pimprenelle
- 1 grande échalote
- 2 oeufs
- 8 à 10 noix
- 6 cuillerées à soupe d’huile d’olive
- sel, poivre
Cuire les oeufs pendant 7 à 10 minutes, les refroidir dans de l’eau froide et les éplucher.
Laver les feuilles de pimprenelle. Les éfeuiller pour éliminer les fibres un peu coriaces des pétioles. Si les feuilles sont toutes jeunes et les pétioles tendres on peut se passer de ce geste qui prend un peu de temps.
Hacher finement la pimprenelle.
Hacher l’échalote, les noix et les oeufs durs. Réunir la pimprenelle, les échalotes, les noix et les oeufs hachés dans un saladier.
Ajouter l’huile d’olive, saler, poivrer et bien mélanger le tout.
Couper la courge spaghetti en deux dans le sens de la longueur, enlever les graines à l’aide d’une cuillère et faire cuire 15 à 20 minutes à la vapeur douce.
Une fois que la chair de la courge est tendre, placer chaque moitié de courge dans une assiette, remplir le creux de farce à la pimprenelle et décorer de quelques feuilles.
Nous nous sommes régalés .
Ca vous donne envie ? Il n’y a plus qu’à aller à la recherche de pimprenelle dans votre entourage !
Ou alors inspirez-vous de cette recette pour la réaliser avec une plante que vous connaissez déjà : du mouron des oiseaux, du lamier, un mélange de feuilles d’alliaire et de mauve… A cette époque automnale il y a pas mal de plantes qui refont des feuilles – peut-être pas aussi tendres qu’au printemps mais toutefois très agréables à utiliser.
Lancez-vous et parlez-moi de vos expériences en commentaire !
A la semaine prochaine pour de nouvelles découvertes sauvages.
Bel hommage à cette grande discrète que je n’ai jamais cuisinée… je me contente d’en croquer un peu quand je passe à côté d’elle et j’admire ses fleurs si particulières !
Ses fleurs sont tellement belles quand on s’approche !
Merci Nathalie !
Félicitations pour la qualité de ces articles, tant sur le fond que sur la forme !
C’est un plaisir de te lire !
Merci, Bertrand, pour ce retour qui me fait très plaisir et qui m’encourage à poursuivre !