La carotte sauvage est une des rares plantes sauvages comestibles bien de chez nous ayant été élevée, au fil des siècles, au rang de légume cultivé et apprécié partout dans le monde. Pourtant, la carotte sauvage (Daucus carota) est peu connue, voire crainte, car elle est facilement confondue avec des plantes sauvages très toxiques. C’est pour ça que nous allons voir comment bien la reconnaître et comment consommer cette plante riche en bienfaits.

Reconnaître la carotte sauvage

Notre carotte est une plante de la famille des Apiacées, une ombellifère qui porte des feuilles très découpées et des fleurs blanches en ombelle. Mais elle a l’inconvénient de ressembler de près à de nombreuses autres Apiacées qui ont ces mêmes caractéristiques et dont certaines sont extrêmement toxiques, comme la grande ciguë par exemple.

Voici plusieurs critères qui vous permettrons d’identifier la carotte sauvage :

1. Présence de poils

Sur la tige et les feuilles la carotte sauvage présente des poils assez courts et drus. Vous pouvez les sentir facilement en touchant la tige.

À savoir : les plantes mortelles de la famille des Apiacées (grande et petite ciguë, ciguë vireuse et oenanthe safranée) n’ont pas de poils du tout. Ce qui ne veut pas dire que toutes les Apiacées qui ont des poils sont comestibles mais au moins le risque n’est pas le même… (Voir l’article sur le cerfeuil des fous)

2. Les feuilles ont un parfum de fanes de carottes.

Logique ! Mais ne vous fiez pas exclusivement à ce critère (ni à un seul autre critère d’ailleurs) car la sensation des odeurs est assez subjective.

3. Le point noir au centre de l’ombelle

Au centre de l’inflorescence se trouve souvent (pas toujours, ce serait trop facile…) un point noir. Plus précisément il s’agit d’une fleur stérile qui est d’abord pourpre et qui devient noire. On l’appelle aussi « mouche de la carotte » car de loin on pourrait croire qu’un insecte y est posé.

4. Des bractées « en trident »

En-dessous de l’ombelle de fleurs se trouve une corolle de petites folioles fines et élégantes, appelées bractées. Chez la carotte sauvage, ces petites bractées finissent divisées en 3 à leur extrémité, comme le trident de Poseidon !

5. La racine au parfum de… carotte !

La racine de la carotte sauvage est blanche, bien moins charnue que celle de nos carottes cultivées. Mais si vous la sentez, vous allez retrouver un bon parfum concentré, typique de carotte.

6. Les fruits en « nid d’oiseau »

Après la floraison, quand les fruits sont en train de se former, l’ombelle qui jusqu’alors était plane ou alors légèrement bombée se resserre vers le haut, comme un parapluie retourné par une bourrasque de vent. Elle prend une forme qu’on qualifie souvent de nid d’oiseau. Les fruits d’abords verts sèchent et tombent à maturité au centre de ce nid.

Ne vous fiez jamais à un seul de ces critères et prenez le temps de bien observer pour être certain de votre bonne identification ! Parfois il est nécessaire de faire le tour de l’ensemble du cycle végétatif, voire deux, pour être assez sûr de soi avant de faire sa première cueillette. La botanique, quand il s’agit d’espèces au potentiel de risque comme ici, est une affaire de patience…

Carotte bisanuelle

Je viens de parler de cycle végétatif… celui de la carotte – sauvage ou cultivée – est de deux ans. La première année la plante ne développe que des feuilles. En automne/hiver sa racine se charge d’éléments nutritifs et en fin de printemps/été elle développe sa tige, ses fleurs puis ses fruits avant que la plante ne dépérisse. Le prochain cycle végétatif se fera à partir des fruits tombés au sol.

C’est ce qu’on appelle une plante bisannuelle.

Consommer la carotte sauvage

Les racines

Parlons d’abord de ce qui semble le plus évident : la racine. Si vous souhaitez en manger, il faut la cueillir au bon moment et ayant lu le paragraphe précédent vous aurez deviné… C’est la saison où la racine se charge en nutriments qui est la plus propice : l’automne et l’hiver. Petite difficulté : à ce moment-là vous n’avez que les feuilles et les racines pour vous donner des indices d’identification… Donc redoublez de vigilance ! Bien-sûr, en cas de doute, abstenez-vous. Il y a malheureusement tous les ans des accidents suite à des confusions avec les plantes mortelles citées ci-dessus…

Ne vous attendez pas à avoir une racine aussi croquante et charnue qu’une carotte du commerce. Les racines de carotte sauvage sont bien plus minces et souvent plus fibreuses, même en hiver. Il sera donc plus difficile de les râper ; aussi je les coupe plutôt en fines tranches pour les ajouter à la salade, les faire revenir à la poêle ou les cuire à la vapeur. Mais le goût de carotte est bien là et il est puissant !

Les fleurs

Voilà la partie de la plante à cueillir au moment où l’identification est bien plus aisée : l’ombelle de fleurs. Leur parfum est aromatique, rappelant le persil, les fanes de carottes et le miel.

Je m’en sers pour parfumer des salades, sauces, crèmes dessert et des fruits, notamment le melon. J’aime aussi sécher les fleurs de carotte pour des infusions au goût délicat.

La recette la plus ludique est celle des beignets de fleurs de carotte sauvage – sucrés ou salés.

Les fruits (« graines ») de carotte sauvage

Voilà une vraie épice locale ! Les fruits de carotte sauvage sont très aromatiques avec des notes d’anis, de zeste d’agrumes et de poire. Ils ressemblent aux graines d’anis ou de fenouil, des plantes qui appartiennent à la même famille botanique. On parle souvent de « graines » malgré le fait que botaniquement parlant il s’agit bien des fruits. Les graines minuscules se trouvent à l’intérieur.

Pour rappel, les fruits sont regroupés dans l’ombelle qui se serre vers le haut en « nid d’oiseau ». Je cueille au moment où les fruits sont encore verts où leur parfum a une fraîcheur appréciable qui reste même au séchage.

Les fruits de carotte frais ou séchés parfument mes légumes, céréales, gratins, poissons, sauces et le sel aux plantes. Mais aussi les préparations sucrées comme les crèmes dessert, les pâtisseries, salades de fruits et compotes.

Quand je fais découvrir l’infusion de fruits de carotte elle est toujours beaucoup appréciée !

Panna cotta aux fruits de carotte sauvage et coulis de baies de sureau, trouvez la recette ici.

Bienfaits des fruits de carotte

D’ailleurs, les fruits de carotte ont de nombreuses vertus : Comme les graines de fenouil ou d’anis ils sont carminatifs (ils aident à éliminer les ballonnements et les gaz). Ils sont également diurétiques, aident à éliminer l’acide urique et ont une action antibactérienne urinaire.

Ils sont considérés comme régulateurs du cycle menstruel. Par contre, ils sont déconseillés aux femmes enceintes ou lors d’une planification de grossesse car les fruits auraient un effet anti-implantation de l’embryon.

L’huile essentielle de fruits de carotte est surtout connue pour ses bienfaits en tant que régénératrice cutanée.

Les feuilles

Un petit mot sur les feuilles – comestibles mais moins intéressantes que les feuilles d’autres espèces sauvages. Vous avez peut-être déjà essayé le pesto de fanes de carottes… Les feuilles en général sont assez fibreuses et à part dans leur tendre jeunesse il est rare que je m’en serve. Toujours est-il… en cas de besoin de verdure pour une soupe, ça peut servir !

Pour aller plus loin

Voici des recettes et articles sur la carotte sauvage pour aller plus loin :

Beignets de fleurs de carotte sauvage

Brochettes de fleurs de carotte sauvage au melon

Panna cotta aux fruits de carotte sauvage

Cuisiner avec les fruits de carotte sauvage

Bonne cueillette et cuisine à la carotte sauvage !