Qui ne rêve pas de se promener au milieu d’un champ de lavande en fleur pour se sentir comme dans une mer de fleurs violettes et de s’enivrer du parfum puissant et apaisant de cette fleur emblématique de Provence ?! Mais ces étendus de lavande cultivée nous font parfois oublier que cette plante est pourtant au départ une plante sauvage et, en plus, bien de chez nous !! Alors allons à la rencontre de la lavande sauvage, ou plutôt des lavandes sauvages !
Dans cet article nous allons observer les différentes espèces sauvages avec leurs spécificités et – vous savez que j’aime ça avant tout – je vais vous donner des idées afin d’utiliser le parfum de ses fleurs magnifiques pour sublimer vos recettes du quotidien !
Si vous avez de la lavande dans votre jardin, vous pourrez bien sûr utiliser ses fleurs sans avoir à vous déplacer dans le Midi. 😊
Distinguer les différentes espèces de lavande sauvage
En France nous trouvons surtout la lavande vraie qu’on appelle souvent lavande fine ou lavande officinale (Lavandula angustifolia) et la lavande aspic (Lavandula latifolia). L’hybride entre les deux, le lavandin (Lavandula x intermedia), peut apparaître de façon sauvage dans des zones où les deux espèces précitées cohabitent mais sa présence est moins commune. Le lavandin est par contre largement cultivé car il permet un plus grand rendement.
La 4ème espèce de lavande sauvage présente assez fréquemment dans le Midi de la France est la lavande stéchade ou lavande à toupet (Lavandula stoechas). Son aspect diffère pas mal de la lavande vraie et de la lavande aspic et son parfum est beaucoup plus camphré, moins fin que celui des autres espèces, c’est pourquoi son utilisation est moins courante.
Les points communs entre espèces de lavande sauvage
Il s’agit de sous-arbrisseaux de 40 à 80cm de hauteur, portant des feuilles d’un vert argenté toute l’année. Pour rappel un sous-arbrisseau est une plante de petite taille qui est ligneuse au moins à sa base. C’est-à-dire qu’il s’agit comme d’un mini-arbrisseau (trouvez plus de détails sur la distinction entre arbre, arbuste, arbrisseau et sous-arbrisseau dans mon article sur le prunellier).
Les feuilles sont très étroites, opposées (= l’une en face de l’autre sur la tige) et entières (non-dentées). Observez-les attentivement et vous verrez que leurs bords sont souvent enroulés vers le dessous !
Les tiges sont quadrangulaires, elles ont 4 faces comme c’est souvent le cas dans cette famille des Lamiacées et à leur sommet elles portent des épis de fleurs violettes. Il s’agit de fleurs bi-labiées, à deux lèvres.
Notons encore que le calice (la partie de la fleur qui se trouve sous les pétales et qui reste en place une fois que les pétales sont fanés) est en forme de tube strié et à 5 dents courtes (pour les voir regardez à la loupe !).
Les lavandes sont très aromatiques.
Voilà pour leurs points communs. Voyons maintenant ce qui les distingue une lavande sauvage de l’autre.
Spécificités de la lavande vraie (= lavande fine/ lavande officinale) (Lavandula angustifolia)
Lavandula angustifolia a l’aspect « typique » d’une lavande. Pour la distinguer de la lavande aspic vérifiez que la tige florifère ne soit pas ramifiée. Chaque tige ne porte qu’un épi floral à son sommet. L’épis est souvent discontinu, vous avez comme un petit trou dans l’épi floral où la tige est nue sur quelques millimètres. La floraison a lieu principalement en juillet.
Ces feuilles sont linéaires, très étroites. Le nom scientifique, angustifolia, veut d’ailleurs dire « à feuilles étroites ». Aussi, le nom lavande fine peut venir du parfum très fin de cette espèce comme des feuilles fines et allongées. Elles sont velues et de couleur argentée au début et pendent au fil du temps un peu leur duvet et deviennent plus vertes.
Si vous aimez les détails vous pouvez aussi observer qu’il n’y a pas de bractées (petites folioles à la base du calice) visibles entre les fleurs.
Spécificités de la lavande aspic (Lavandula latifolia)
La distinction avec la lavande vraie se fait en premier lieu sur la tige : celle de la lavande aspic est ramifiée et souvent plus longue. Vous avez au moins une ramification vers le haut de la tige : depuis le rameau central deux rameaux partent d’un même point de façon opposée (en « trident »). Parfois il y a une ramification plus bas sur la tige, avec des rameaux bien plus courts. Au sommet de chaque rameau se trouve un épi de fleurs violettes et odorantes, d’un parfum plus camphré que celui de la lavande fine et également très agréable. Cette espèce fleurit généralement 2 à 3 semaines plus tard que la lavande vraie (juillet à septembre)
Les feuilles s’élargissent vers le haut, aussi le nom scientifique latifolia veut dire à larges feuilles. Elles restent argentées et velouté-duveteuses toute l’année.
Si vous regardez attentivement les fleurs vous pourrez observer de petites bractées linéaires entre les fleurs.
La lavandin (Lavandula x intermedia), espèce hybride entre les deux espèces présente des caractéristiques mélangées des deux espèces en plus robuste, de grande taille. Il est présent là où les deux espèces sont présentes.
Spécificités de la lavande stéchade ou lavande à toupet (Lavandula stoechas)
Sa spécificité se retrouve dans le nom français qu’on lui donne : lavande à toupet. L’épi floral est surmonté de grandes bractées violettes ou pourpres qui ressemblent à des pétales sans en être. Les fleurs qui se trouvent en-dessous dans un épi très dense à aspect écailleux sont minuscules. Ce qui distingue cette espèce des autres est aussi qu’elle porte des feuilles jusqu’en-dessous des épis floraux alors que les longues tiges des deux autres espèces sont presque nues sur une longue partie supérieure. La floraison s’étale d’avril à juin.
L’odeur de la lavande à toupet est bien plus camphrée et rappelle un peu la térébenthine. Le parfum est moins agréable que celui, typique de lavande, des deux premières espèces.
Où trouver la lavande sauvage ?
Toutes les espèces poussent de façon sauvage dans des milieux arides et ensoleillés. Elles profitent du pâturage extensif des moutons qui entretiennent des conditions qui leurs sont favorables.
« La lavande vraie affectionne les coteaux calcaires et arides, les pelouses montagnardes, les rocailles, les landes, les forêts dégradées. On la trouve à partir de 600 m d’altitude dans la région méditerranéenne. Elle grimpe jusqu’à 1800 m dans les Alpes Maritimes. » (Thierry THEVENIN, Cédric PERRAUDEAU, Jacky JOUSSON ; Le chemin des herbes ; ed. Ulmer). Elle est absente des régions littorales (Pierre LIEUTHAGHI ; Une ethnobotanique méditerranéenne ; ed. Actes Sud).
« La lavande aspic remonte du littoral méditerranéen jusque dans les Hautes Alpes, la Drôme, l’Aveyron et même la Dordogne dans des endroits également ensoleillés, très arides et calcaires. » (Thierry THEVENIN, voire plus haut) Mais elle monte moins haut en altitude, 500 à 700 m suivant l’exposition, 1200 m sur le flanc sud des Pyrénées-Orientales.
La lavande à toupet, lavande stéchade, a besoin d’un pH acide et de variations de hydriques marquées. On la trouve sur les coteaux arides et siliceux de Provence, du Languedoc et du Roussillon. Elle est présente également en Corse alors que les deux autres espèces y sont rares, voire absentes.
Le meilleur moment de cueillette
Le moment idéal pour cueillir la lavande est lorsque deux tiers des fleurs sont écloses. C’est là qu’elles seront les plus parfumées et les plus riches en huiles essentielles. Vous pouvez les utiliser fraîches ou alors les faire sécher et les utiliser sèches par la suite.
Mes souvenirs de cueillette de lavande
J’ai eu la chance, étant étudiante, de participer à la cueillette de la lavande à la main dans une ferme bio dans la Drôme. Je parle ici de lavande cultivée mais je garderai l’image dans ma tête toute ma vie ! C’était un matin ensoleillé où le violet franc des fleurs de lavande, le vert doux de ses feuilles et l’ocre du sol caillouteux se mariaient harmonieusement. Imaginez le tout sous un ciel d’un bleu intense et sublimé avec des touches d’un jaune clair qu’apportaient d’innombrables petites astéracées qui ne s’ouvraient que le matin.
Chacun avait noué un drap autour de son torse pour former un sac dans son dos et nous avancions chacun sur son rang à cueillir la lavande à la faucille et à la déposer dans son dos dans le drap.
La récolte était destinée à la distillation d’huile essentielle et nous l’avions amenée à la distillerie artisanale où les fleurs étaient traversées par la vapeur d’eau pour en extraire l’essence. J’ai adoré participer à tout cela même si l’expérience m’a coûté une insolation (je crois que je n’avais qu’un petit foulard sur la tête alors qu’on cueillait pendant des heures en plein soleil …) !
Huile essentielle de lavande
Comme nous venons de dire, la lavande est souvent distillée pour en extraire l’huile essentielle, qu’il s’agisse de lavande sauvage ou de lavande cultivée. Je ne m’étalerai pas ici sur les différences des propriétés des différentes espèces. Juste en quelques mots :
- La lavande vraie est plus utilisée pour ses propriétés calmantes, antispasmodiques, sédatives et antiseptiques.
- La lavande aspic est surtout utilisée pour ses propriétés bénéfiques pour les voies respiratoires, en cas de brûlures et piqûres et anti-infectieux.
- Le lavandin a également des propriétés calmantes mais sont huile essentielle, au parfum moins fin que celui de la lavande vraie, est surtout utilisée en cosmétique et dans l’industrie pour parfumer bougies, lessives et autres produits d’entretien.
- La lavande à toupet est peu utilisée.
Pour en savoir plus sur l’utilisation des huiles essentielles consultez des sites d’aromatherapie comme celui-ci.
Comment utiliser les fleurs de lavande en cuisine ?
En tant que cueilleuses et cueilleurs occasionnels qui ramassons quelques bouquets de lavande sauvage par-ci par-là lors d’une randonnée dans le Midi ou sur nos pieds de lavande plantés autour de la maison, nous n’en ferons pas d’huile essentielle. Alors comment utiliser nos fleurs de lavande ?
Une première possibilité est d’en faire des infusions. La subtilité se trouvera dans le dosage. Personnellement un épi floral dans une tasse me suffit mais je ne me fais pas des tisanes très concentrées. Peut-être que vous aimerez l’infusion un peu plus corsée.
Si on en met trop, dans l’infusion ou dans d’autres préparations culinaires, le risque est que le goût rappelle trop les produits ménagers. Dosez donc doucement au départ de vos expériences et augmentez la dose si le parfum n’est pas assez présent à votre goût.
Pour ce qui est des tisanes vous pouvez bien sûr faire votre mélange et n’ajouter qu’un peu de lavande pour le parfum et pour l’effet apaisant.
La lavande dans les glaces et crèmes dessert
Une façon plaisante d’utiliser la lavande, fraîche ou séchée, est de la faire infuser dans du lait et de la crème et d’utiliser le liquide parfumé pour réaliser une crème dessert, de la crème catalane à la panna cotta, en passant par la crème anglaise et la crème aux œufs. Ou alors de la glace. Dans mon restaurant je servais de la glace à la lavande faite maison avec des pêches rôties au miel et au thym citron. Un délice !
D’ailleurs, le lait ne se colorie pas en violet quand on y fait infuser des fleurs… ou très légèrement seulement. Dans ma glace à la lavande que vous voyez sur cette photo j’ai ajouté du jus de myrtille pour la couleur !
La lavande avec les fruits
Le parfum de lavande se marie très bien avec les abricots, les pêches et nectarines, les poires, les prunes type reine Claude et le melon. Toujours dans mon restauran, je préparais une tarte au melon et à la lavande qui suscitait de l’étonnement (cuire du melon ?!) mais qui avait beaucoup de succès.
Une recette simple qui marie lavande et fruits est de couper des fruits (abricots, pêches…) en deux, de poser une petite cuillerée de miel au centre, 2 ou 3 fleurs de lavande, pas plus pour chaque moitié de fruit et de faire rôtir les fruits au four. Servi avec une petite glace, c’est l’idéal !
Bien-sûr vous pouvez parfumer vos tartes, vos compotes et confitures, toujours en modérant la quantité de fleurs pour garder un bel équilibre.
La lavande dans les pâtisseries
J’aime surtout la lavande dans les sablés. Le mieux est de hacher les fleurs pour bien répartir leur parfum et, toujours pareil, de ne pas trop en mettre. Pour un pâton de pâte sablée fait à partir de 200 g de farine, je ne compterais pas plus qu’une cuillerée à café bombée de fleurs de lavande que je hacherai pour l’occasion. Collez deux sablés ensemble avec un peu de confiture d’abricot – ça n’en sera que meilleur ! (Dans ce cas baissez la quantité de sucre de vos sablés pour que le tout ne soit pas trop sucré.)
Si vous êtes adeptes des macarons pourquoi pas réduire en poudre les fleurs de lavande séchées et en parfumer vos macarons ?
Sucre aux fleurs, sirop et liqueurs
En réduisant les fleurs de lavande en poudre (dans un moulin à café électrique ou le petit bol de votre blender) vous pouvez facilement réaliser un sucre à la lavande. Il suffit de mélanger les deux et d’attendre que le sucre s’imprègne du parfum de lavande.
Pour faire un sirop de lavande faites une infusion assez corsée de lavande dans de l’eau, filtrez et ajoutez du sucre. Vous pourrez l’utiliser pour préparer des cocktails, des desserts (voir la partie crèmes desserts, au lieu d’infuser de la lavande dans du lait mettez du sirop) ou juste le boire bien frais en sirop à l’eau.
Les liqueurs se préparent en mettant simplement des fleurs à macérer dans de l’alcool. On attend quelques semaines, on filtre, on ajoute du sucre à sa convenance et la liqueur est faite !
Apprendre à aimer la lavande sauvage
J’espère que je vous aurai donné quelques idées d’utilisation de la lavande et que les distinctions entre les différentes espèces vous seront utiles quand vous rencontrerez une lavande dans la nature. Savoir lui donner son nom exact est pour moi toujours comme lier une nouvelle amitié avec une plante.
C’est pour cela que je ne réagis pas trop aux quelques voix qui crient que par mon travail je ferais trop connaître les plantes qui après seraient pillées… Quand on observe les plantes comme j’incite à le faire on ne peut qu’apprendre à les aimer et à les préserver… L’observation attentive est indispensable pour une bonne identification et pour ne pas faire de confusions. Et par elle on crée une relation avec la plante. C’est bien ça qui nous manque dans notre monde de consommation qui va à cent à l’heure : une vraie relation avec la nature.
Bonjour,
vous nous avez mis l’eau à la bouche avec votre tarte au melon et à la lavande…. serait-il possible d’avoir la recette ??
Merci d’avance !
Je fais une pâte avec 200 g de farine, 100 g de beurre ou de margarine, 2 cuillerées à soupe de sucre et autant d’eau que nécessaire pour que la pâte ait la bonne consistance pour être étalée. Je l’étale au fond d’un moule à tarte, je dépose des lamelles de melon de 1 cm d’épaisseur environ, je verse le jus d’un demi citron sur le melon et je le saupoudre de sucre. Et hop au four à 180° pendant 30 à 35 minutes.
Bonjour 🙂 Auriez vous une recette de glace à la lavande à partager svp ?
(Et peut-on toujours bien distinguer le type de lavande lorsqu’elle est séchée ?)
Merci beaucoup !
Je fais infuser une douzaine de brins de lavande dans 3/4 de litre de lait pendant 10-15 minutes et je filtre. Je mélange 200 g de sucre avec 4 oeufs et je verse le lait ainsi que 25 cl de crème liquide. Et je mets l’ensemble dans ma sorbetière pour que ça prenne.
superbe ! mille mercis à vous, je vais essayer ca 🙂
Confiture abricots lavande, miam. Mais toujours la main légère. C’est vraiment une plante qui demande juste un accord subtile.